L’agrile du frêne cogne aux portes de Trois-Rivières

ENVIRONNEMENT. Ce n’est qu’une question de temps avant que l’agrile, ce petit insecte de quelques millimètres seulement qui pourrait bien ravager la population de frênes en entier, débarque à Trois-Rivières. Et déjà, des Trifluviens déboursent des centaines de dollars pour éviter la coupe à blanc de leurs arbres, s’il n’est pas déjà trop tard…

De nombreux clients de Service d’arbres Robec sont prêts à tout pour sauver leurs arbres. Depuis trois ans, l’entreprise a traité une cinquantaine de frênes chez des particuliers à Trois-Rivières grâce à un insecticide. Le prix à payer se situe entre 150$ et 800$ selon la dimension de l’arbre. Et une fois traité, le combat est loin d’être terminé.

«Il faut recommencer tous les deux ans», a indiqué l’arboriculteur pour Robec, André Robitaille. «Le traitement peut aussi être injecté une fois l’arbre infecté, mais son efficacité n’est pas garantie.»

Pour l’heure, la «bibitte destructive» n’a pas encore été détectée à Trois-Rivières. L’insecte serait toutefois déjà en ville, perché à la cime des arbres, avance l’arboriculteur.

«Je suis convaincu que l’agrile est ici de façon latente et qu’on ne le découvrira qu’une fois qu’il fait mourir un premier arbre», soutient celui qui est membre de l’American Society of Consulting Arborists. Les larves se développent d’abord sournoisement sous l’écorce, explique-t-il. «Cela peut prendre deux à trois ans avant que l’infection ne se manifeste.»

Une fois manifestés, les ravages sont fulgurants. Les villes n’ont d’autres choix que d’opter pour l’abattage de ces grands arbres infectés afin de «régler le problème». Les frênes qu’on aperçoit abondamment dans le paysage urbain disparaissent en quelques années dans un secteur touché.

Déjà, à Montréal, le nombre de frênes abattus se compte par milliers. L’insecte ne s’est pas arrêté là et a poursuivi sa route vers l’est. Il a été repéré à Saint-Gabriel-de-Brandon, dans la MRC d’Autrey, et tout récemment à Sorel, au sud du Lac-Saint-Pierre.

Cela laisse craindre le pire pour les régions de la Mauricie et du Centre-du-Québec.

Course contre la montre

Face à l’arrivée imminente de l’agrile du frêne sur son territoire, la Ville de Trois-Rivières est passée en mode prévention. Chaque année, depuis cinq ans, la Ville installe une vingtaine de pièges sur plusieurs de ses frênes dans le but de détecter son arrivée chez nous. «Pour l’instant, on touche du bois», a-t-il lancé.
En tout, 1900 frênes ont été répertoriés en bordure des rues et dans les parcs, ce qui représente près de 10% du couvert forestier urbain de la Capitale régionale. Il y en a toutefois bien plus sur le territoire trifluvien.

C’est pourquoi l’administration municipale lancera dès cet été une campagne pour recenser les frênes situés sur des propriétés privées. «Il nous reste à attacher toute la logistique afin de rejoindre le plus efficacement possible l’ensemble des citoyens. Cela va nous permettre de mieux les accompagner lorsque l’agrile sera ici», a expliqué Yvan Toutant.

La Ville n’a encore aucune idée de combien coûtera cette campagne. On sait toutefois que la lutte à l’agrile du frêne coûte cher, très cher. La Ville de Montréal dépense des millions de dollars chaque année dans ce combat.

Selon l’Agence canadienne d’inspection des aliments, les municipalités canadiennes devront dépenser 2 milliards de dollars au cours des trente prochaines années afin de remplacer les arbres infectés.

En attendant, le mot d’ordre à Trois-Rivières est de ne plus planter de frênes.

 

ARRIVÉE PAR BATEAU, PROPAGÉ PAR LE BOIS

Originaire d’Asie, l’agrile du frêne a été détecté pour la première fois en Amérique du Nord en 2002, plus précisément à Windsor, en Ontario. L’insecte serait arrivé sur le continent via le bois d’emballage qui transite par bateau.

L’Agence canadienne d’inspection des aliments recommande d’ailleurs à tous les campeurs de ne pas transporter de bois de chauffage en provenance d’une autre région. En effet, l’activité humaine serait en grande partie responsable de la dispersion de l’insecte ravageur.