La maladie force Yves Lévesque à démissionner
TROIS-RIVIÈRES. Le maire de Trois-Rivières, Yves Lévesque, a annoncé officiellement sa démission jeudi matin par voie de communiqué. Des ennuis de santé le poussent à quitter la vie politique.
Cliquez ici pour lire la lettre intégrale d’Yves Lévesque aux citoyens
«C’est avec une âme remplie de tristesse, que je vous informe de la difficile et déchirante décision de quitter mon poste de premier magistrat à titre de maire de la Ville de Trois-Rivières, peut-on lire. Pour des raisons médicales et sur la directive de mon médecin, j’en suis arrivé à cette inéluctable décision.»
«Je me dois de vous témoigner à vous, Trifluviens, une reconnaissance incommensurable pour la confiance que vous m’avez accordée depuis plus de vingt ans, et je vous en serai toujours redevable», a-t-il tenu à dire aux citoyens de Trois-Rivières, ajoutant qu’il quitte avec le sentiment du devoir accompli.
M. Lévesque devait revenir au travail au début du mois de janvier, lui qui était en congé de maladie depuis octobre sous recommandation de son médecin.
Les conseillers municipaux ont appris la nouvelle ce matin, réunis en caucus.
«C’est effectivement son médecin qui a fortement recommandé à M. Lévesque de se retirer complètement et de ne pas penser à un retour quelconque, confirme Yvan Toutant, porte-parole du cabinet du maire. Cela a fait mûrir sa décision en ce sens. Quand c’est une question de santé, il faut prendre ça au sérieux.»
C’est une véritable onde de choc qui a balayé les élus municipaux, ainsi que les membres du cabinet du maire.
«C’est sûr qu’on n’a pas toujours été d’accord sur la façon de faire et sur des décisions, poursuit avec émotion M. Toutant qui œuvrait aux côtés d’Yves Lévesque depuis de nombreuses années. On s’est chicané à certaines occasions, mais c’était tellement un leader. Trois-Rivières tourne une page importante aujourd’hui. On peut être en désaccord sur la façon de faire, mais les réalisations, en bout de ligne, auront permis aux Trifluviens d’avoir une plus grande fierté.»
Cette démission sera effective au moment où le conseil de ville siégera de nouveau, soit le 15 janvier. Cela signera le début de la fin du règne d’Yves Lévesque comme maire de Trois-Rivières, qui en était à son cinquième mandat consécutif.
La nouvelle de la démission du maire a été une surprise pour la mairesse suppléante, Ginette Bellemare, qui a toujours travaillé aux côtés d’Yves Lévesque depuis le début de sa carrière politique en 1998.
«Au début de ma carrière politique en 1998, Yves Lévesque était conseiller du district de Cherbourg. J’ai toujours travaillé à côté de lui. Ç’a été un gros choc ce matin de constater que je ne travaillerais plus avec lui. On a collaboré sur plusieurs dossiers ensemble et c’est lui qui m’a nommée mairesse suppléante», commente-t-elle.
«C’était un bâtisseur. Il a fait de grandes choses pour la ville, ajoute Mme Bellemare. La fusion municipale s’est bien faite ici. C’est un homme engagé, très disponible. On le voyait sur la rue des Forges 365 jours par année. Je le vis présentement: c’est sept jours sur sept. Il n’y a jamais de coupures. M. Lévesque avait ces valeurs pour faire fonctionner la ville. Il a attiré les touristes, les gens d’affaires… Je suis fière de tout ce qu’il a fait.»
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Les conseillers sous le choc
Plusieurs conseillers se sont d’ailleurs dits surpris de cette annonce ce matin. Ils étaient tous présents, à l’exception de Daniel Cournoyer et Mariannick Mercure qui étaient retenus ailleurs. Voici ce que les élus ont dit.
«Pour moi, c’est une triste nouvelle pour la ville de Trois-Rivières. C’est un homme qui a fait beaucoup. Depuis la fusion, il a travaillé avec cœur et acharnement pour faire avancer notre ville. C’est lui qui a fait de la fusion un succès. Il compte de grandes réalisations. Il a de grands souliers à chausser et qu’on l’aime ou pas, il nous a donné une fierté. C’est sûr que [sa démission] est une nouvelle historique en soi, mais triste, d’un homme qui a passé 20 ans à la tête d’une grande ville.» – Valérie Renaud-Martin, district des Carrefours
«Je suis heureux de voir qu’il a choisi sa santé et sa famille avant la politique. (…) J’assume toutes les réalisations d’Yves Lévesque. Je ne remettrai jamais en question l’Amphithéâtre, Trois-Rivières sur Saint-Laurent et le Colisée, même si ce dernier va impacter le budget. Le Colisée est un équipement qu’on aura pour les 20, voire 75 prochaines années. C’est un investissement.» -Pierre Montreuil, district du Carmel
«Je suis étonné du timing de cette annonce, mais on sentait que le dossier médical de M. Lévesque était plus sérieux et laissait présager une extension ou un départ définitif. J’ignore s’il rebondira à un autre palier politique. Les échos que j’en ai, c’est qu’il a encore beaucoup de temps à passer pour se refaire une santé.» -Denis Roy, district Marie-de-l’Incarnation
«Il a fait son choix pour des raisons de santé. Je respecte ça. Ces derniers mois, on a appris à vivre sans lui. C’est quelqu’un qui avait beaucoup de ténacité. On ne s’entendait pas sur tout. Il mettait beaucoup d’énergie au travail. Ça aurait été vraiment intéressant de pouvoir créer une synergie entre le nouveau conseil et lui. M. Lévesque a su amener une certaine fierté chez les gens de Trois-Rivières. Je le perçois. Il a insufflé cette fierté.» -Claude Ferron, district des Rivières
«On souhaitait que sa santé s’améliore, mais ça n’a pas l’air d’être le cas. Je trouve ça dommage, mais la vie est comme ça. C’est un homme fier, avec une vision. C’est aussi un homme de défis et d’action. Il a fait de magnifiques réalisations pour Trois-Rivières. Je pense qu’on a été la plus belle fusion au Québec.» -Luc Tremblay, district de Châteaudun
«Sincèrement, j’aimerais le voir rebondir quelque part en politique. Il a fait 25 ans au municipal. Ce n’est pas rien! J’ai le souvenir de l’élection de 2001. Je m’étais présenté dans Sainte-Marguerite. On dit souvent aux politiciens de ne pas travailler la dernière journée. Lui, à 15 minutes de la fermeture des bureaux de vote, il était encore en veston, sous la petite pluie, à encourager les gens à aller voter. C’est le souvenir que je garde de lui: rien n’est gagné tant que ce n’est pas gagné.» -François Bélisle, district de Pointe-du-Lac
«Je suis surtout inquiet de sa santé. Qu’un gars aussi passionné décide de démissionner, ça suscite l’inquiétude. J’ai envie de saluer l’engagement qu’il a eu pour sa ville. C’est ce qu’on souhaite avoir comme maire. Il a accompli de grandes choses et a été important pour Trois-Rivières. Il a marqué la ville de façon très importante. On s’engage à poursuivre avec les succès qu’il a connus et continuer à œuvrer avec le même engagement et la même passion qu’il a pour la ville.» -Dany Carpentier, district de La-Vérendrye.
«Je suis un peu ébranlée en ce moment. Je pense d’abord à ce que ça a dû lui demander de prendre une telle décision. C’est lui qui est venu me chercher en 2013. Ça me fait un petit pincement au cœur. Il a fait de belles réalisations pour la ville. Il faut le lui accorder. C’est un homme qui, malgré la politique, était humain. Ça m’a marquée. Je lui souhaite de la santé.» -Sabrina Roy, district de la Madeleine
«C’est une surprise et une triste nouvelle. Ça doit être extrêmement difficile pour un homme aussi passionné de renoncer à sa principale passion, celle pour laquelle il a fait beaucoup de sacrifices personnels. Je lui souhaite de retrouver l’équilibre le plus rapidement possible.» -Pierre-Luc Fortin, district des Estacades
«C’est triste pour tout le monde, surtout pour lui. C’est désolant de voir un homme de sa grandeur partir. Je lui souhaite la meilleure des chances. Il ne mérite pas d’être en bas de la côte après 25 années à donner à Trois-Rivières. Malgré ses défauts, c’est un grand homme.» -Michel Cormier, district Saint-Louis-de-France
«C’est une journée triste pour le conseil municipal, pour la ville. Je crois que notre priorité, c’est de lui offrir de retrouver sa santé, autant pour lui que pour sa famille. La famille, c’est important. Pour M. Lévesque, la ville est son cinquième enfant. C’est une perte pour la ville qu’il quitte de cette façon.» -Maryse Bellemare, district de Chavigny
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Vers une élection en mai
À compter du 15 janvier, la présidente des élections disposera de quatre mois pour tenir un scrutin à la grandeur de la ville, en vertu de la Loi sur les cités et villes. Cela nous mènerait au mois de mai.
À la Ville, on prévoit que l’élection partielle devrait coûter un million de dollars. La moitié de ce montant a déjà été amassé en prévision des élections municipales de 2021. Le conseil municipal devra décider dans quelle enveloppe municipale piger pour combler le reste de cette somme.
Les conseillers municipaux se sont entendus pour se rallier derrière Ginette Bellemare qui assurera l’intérim pour les quatre prochains mois. Elle aura tous les pouvoirs du maire, à l’exception du droit de veto.
L’heure est maintenant au travail d’équipe.
«Notre ville mérite d’aller plus loin. Autour de la table, on a des gens qui sont capables de se projeter dans le futur et d’autres capables de joindre des générations plus jeunes. Je pense qu’on pourra voir de belles choses dans les prochains mois», lance Pierre Montreuil, qui préfère voir le verre à moitié plein plutôt que l’inverse.
«On se retrouve avec une ville sans maire, mais la mairesse suppléante est là. Je suis contente que ce soit elle, car on est habitué depuis quelques mois. C’est rassurant», ajoute Valérie Renaud-Martin.
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25 ans de politique municipale
Yves Lévesque a été élu pour la première fois en 1994 comme conseiller municipal du district de Cherbourg de l’ancienne ville de Trois-Rivières Ouest. C’est en 1999 qu’il a brigué, avec succès, la mairie de Trois-Rivières Ouest.
À l’heure des fusions municipales en 2001, il a remporté l’élection à la mairie de la nouvelle grande ville fusionnée. Il avait alors fait campagne sur le thème de la relance économique. M. Lévesque en étant à son cinquième mandat. Il avait d’ailleurs promis de compléter ce mandat, le dernier, avait-il précisé.
On le savait toutefois intéressé par une éventuelle candidature comme député de Trois-Rivières sous la bannière du Parti Conservateur du Canada aux prochaines élections fédérales.
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