DOSSIER Trouble de personnalité limite : «Elle reste fragile»

TÉMOIGNAGE. «Ça vient m’affecter dans ma vie quotidienne au grand complet», confie Lyne.

Lyne n’a pas développé de trouble de personnalité limite.

C’est sa fille, maintenant âgée de 29 ans, qui en est atteinte.

«Les personnes souffrant d’un trouble de personnalité limite sont énormément hypersensibles. Ils ont des hauts et des bas tout le temps, voire même dans la même journée. Par exemple, elle peut avoir une grosse joie et alors, elle m’appelle et la vie est belle. Dix minutes plus tard, elle me rappelle parce qu’elle vient de parler avec quelqu’un qui ne va pas bien et ça l’a affectée. Ultimement, ça finit par m’affecter aussi. J’ai dû mettre beaucoup de limites en tant que parent», raconte Lyne.

«Ça a beau s’appeler le trouble de personnalité limite, c’est super important de mettre des limites. Ma fille peut me dire que je suis une si ou une ça. C’est difficile, mais il ne faut pas que je m’y arrête. Ma fille m’appelait constamment, parfois à 23h, minuit ou aux petites heures du matin. Ça ne finissait plus. C’était toujours urgent pour elle. J’ai dû lui dire de ne plus m’appeler après 22h. Pour elle, j’étais toujours disponible. C’est une difficulté à laquelle j’ai fait face», poursuit-elle.

Peu d’aide

Plus Lyne instaurait des limites, plus sa fille se responsabilisait et mieux les choses allaient.

«Elle a été diagnostiquée à l’âge de 19 ans. À 13 ans, nous sommes allées voir un pédopsychiatre qui nous a fit qu’elle souffrait de troubles de comportement et de symptômes du trouble de personnalité limite, mais il ne pouvait pas émettre de diagnostic parce que la personnalité ne se cristallise pas avant 18 ans», explique-t-elle.

D’ailleurs, les années d’école de sa fille n’ont pas été de tout repos en raison de ses troubles de comportement et de son impulsivité, associés à des troubles d’apprentissage.

«On a eu peu d’aide. Les professeurs et directeurs d’école appelaient pour souligner ses troubles de comportement. Ça a été extrêmement difficile au primaire. En secondaire 1, elle est allée dans une classe adaptée de 10 élèves avec un professeur spécialisé. Ça a été moins pire à cette école: ils mettaient des limites et il y avait un plan d’intervention. Il y avait quelque chose de palpable», précise Lyne.

En centre jeunesse

Lorsque sa fille lui a violemment lancé un téléphone tout près du visage, Lyne a appelé la police. «Je n’étais plus capable», confie-t-elle.

Sa fille a été conduite au centre jeunesse. Elle revenait à la maison les fins de semaines lorsque la semaine avait bien été.

«Des injures, j’en ai eues à la tonne. Elle vivait aussi des crises au centre jeunesse. Elle m’appelait. Les intervenants l’ont beaucoup fait cheminer. De 18 à 27 ans, on a pu obtenir de l’aide auprès de l’organisme La Lanterne. Ça a été une aide très bienvenue. On a des balises et on peut rencontrer une intervenante n’importe quand», souligne-t-elle.

Prisonnière de la zone grise

«Ça me désole ne pas avoir eu d’aide ou d’organismes auxquels faire appel durant cette période floue avant que ma fille soit diagnostiquée. J’étais dans une zone grise comme parent», affirme Lyne.

Aujourd’hui, les choses vont beaucoup mieux.

«Ma fille est en appartement. Ça restera toujours difficile pour elle pour le reste de sa vie. Il faut être présent pour elle. Elle peut compter sur moi, quoi qu’il lui arrive dans sa vie. Avec la responsabilisation, elle s’est apaisée du côté du comportement, mais elle reste fragile», conclut Lyne.