Des propriétaires aux mains liées

Le coût de la vie a augmenté grandement et le prix des logements n’y échappe. Plusieurs critiquent l’augmentation des prix mensuels, mais les propriétaires ne voient pas d’autres choix que de procéder à ces augmentations. 

L’Hebdo Journal a approché différents propriétaires de la région.

« En 2018, j’augmentais mes logements à 10$ par mois, comme c’était le cas depuis longtemps. Depuis deux ans, j’ai dû augmenter les prix de 30$ par mois et contrairement à la pensée populaire, ce n’est pas pour choquer, ni profiter », lance Sylvain, un propriétaire qui préfère taire son nom de famille.

« Il y a plusieurs raisons qui ont engendré ces augmentations. D’abord, le prix des assurances et les taxes ont augmenté drastiquement. Tous les services sont plus chers également, comme les tondeurs de pelouse ou les compagnies de déneigement. Les corps de métier sont de plus en plus rares aussi. Si on recule de quelques années, je pouvais offrir une tâche à trois plombiers différents et soumissionner. À l’heure actuelle, ils sont moins nombreux et ils sont débordés, alors c’est extrêmement dur à trouver. Ce phénomène fait aussi en sorte qu’ils ont augmenté les prix alors tu peux payer 80$/l’heure ou 90$/l’heure au lieu de 60$ ou 65$ », ajoute-t-il.

Parmi les autres causes se trouvent les nouveaux acheteurs qui arrivent dans un marché qui a fait des bonds de géant ces dernières années.

« Lorsque j’ai acheté mon bloc à quatre portes, j’ai payé 285 000$. La semaine dernière, je connais un acheteur qui a déboursé 950 000$ pour un quatre portes du même genre. Mon hypothèque est basée sur le 285 000$, mais la sienne est quatre fois plus élevée. Ça entraîne quoi? Ses loyers vont être beaucoup plus chers, ce qui vient jouer sur le marché. Si on combine tous les nouveaux acheteurs qui doivent louer un 4½ à 850$ ou 900$ pour couvrir leurs frais, la moyenne des 4½ augmente automatiquement », explique Sylvain.

« La croyance populaire, c’est que le propriétaire collecte 900$ clair à la fin du mois. Depuis deux ans, les coûts de matériaux ont explosé également. Avant, on pouvait faire des deals chez le quincaillier lorsqu’on achetait en grande quantité. Présentement, il n’y a aucun deal possible et la facture est plus élevée encore. Combien de propriétaires ont procédé à des réparations ou des rénovations en sortant un 9000$ ou un 10 000$ de leur poche, en fin de compte? »

Ne jouant pas à l’autruche non plus, Sylvain est conscient que certains propriétaires doivent quand même abuser. « Mais dans la majorité des cas, les propriétaires tirent sur les bords pour suivre l’augmentation des frais et pour ne pas perdre de l’argent non plus. Les frais, ils n’arrêtent pas de monter. »

Pour cet autre propriétaire d’expérience, qui voulait lui aussi conserver son anonymat, l’augmentation des prix d’assurances est l’une des causes principales qui a entraîné une hausse du prix de location de ses loyers. « J’ai augmenté tous mes loyers de 30$ à 35$/mois et ça ne couvre même pas mes hausses de dépenses. Les prix d’assurances ont beaucoup augmenté à cause des coûts de matériaux pour reconstruire en cas de sinistre, témoigne-t-il. Mes assurances ont augmenté de 18$ par mois. La somme de tous les frais est énorme au final. Dans l’imaginaire collectif, le propriétaire est toujours un nanti. Mais la vérité, c’est qu’il vit endetté pendant plusieurs dizaines d’années. Il faut faire attention également parce que ce ne sont pas tous les propriétaires qui ont cinq ou dix blocs. »

Il mentionne aussi que les immeubles sont vieillissants et nécessitent de l’entretien et de la modernisation.  « Chaque personne aimerait habiter dans un logement parfait, mais personne ne veut payer la facture. Le propriétaire investit, mais ne peut absorber les coûts, les risques, les plaintes, les pertes de loyer et les bris sans rien avoir en retour. Personne ne le ferait », conclut-il.