Avocats en télétravail : «On gagne en efficacité»

Forcé de s’adapter à la nouvelle réalité du télétravail, le système judiciaire a entrepris un important virage numérique ces derniers mois. Mener des interrogatoires et faire des plaidoiries à distance, ce n’était pas chose commune avant cette année. Mais une fois les inquiétudes mises de côté, l’expérience s’avère concluante dans plusieurs cas.

«J’avais certaines appréhensions au départ, comme le fait de ne pas bien percevoir les réactions et le non verbal du témoin. Et finalement, ça va bien. Et les commentaires que j’entends de mes collègues sont positifs», mentionne Me Pierre Soucy.

Avocat bien connu pour le dossier de la pyrrhotite à Trois-Rivières, ce dernier y voit même une façon de travailler plus efficacement. «Une audience virtuelle, ça ne peut pas égaler ni remplacer une audience en personne, mais il y a du positif au travail à distance, soutient-il. On gagne du temps et on gagne en efficacité en évitant plusieurs déplacements. Par exemple, on a accès maintenant au dépôt électronique des procédures judiciaires.»

«Je n’ai pas encore vécu l’expérience d’un procès complet en vidéoconférence, mais j’ai eu l’occasion, entre autres, de vivre trois jours d’interrogatoires à distance, ajoute Me Soucy. Quand on a besoin de se partager des informations, on peut partager nos écrans. C’est concluant dans l’ensemble.»

Par contre, ce dernier remarque le virtuel a ses limites. «On perd de la spontanéité, dit-il. Le rythme d’un interrogatoire est plus soutenu en personne. Par vidéoconférence, ça demande une certaine discipline pour s’assurer qu’on ne parle pas tous en même temps, sinon, c’est cacophonique, on n’entend rien.»

Même son de cloche chez son collègue Me François Bélisle. «En virtuel, c’est moins spontané, constate-t-il également. On est des êtres d’instinct, alors c’est certain que ça ne peut pas remplacer les audiences en personne. C’est la même chose pour les rencontres avec les clients. Oui, ça peut se faire à distance, mais, à choisir, je préfère que ce soit en personne.»

Lui qui a participé à quelques audiences à distance reconnaît toutefois que le virage numérique du système judiciaire permet des conclusions plus rapides dans certains cas. «Ç’a débloqué des choses. Quand on a des ententes, on peut fonctionner en ligne maintenant. On peut envoyer des documents au juge, signer des documents du bureau et les numériser pour envoi électronique», énumère Me Bélisle.

Prêt pour la 2e vague

Si la Justice a dû refaire ses repères au printemps, ce n’est pas le cas pour cette deuxième vague de la COVID-19. Présentement, même en zone rouge, le système judiciaire est hybride, c’est-à-dire que ses acteurs font du télétravail, mais peuvent également exercer leur métier en personne lors que les conditions le permettent.

«Tout porte à croire qu’on devra composer avec la pandémie pendant encore plusieurs mois. Pour certains dossiers, ce sera plus difficile d’être à distance, mais dans l’ensemble, c’est un virage intéressant même s’il reste encore des changements à venir. Il faut dire qu’on part de loin au niveau technologique. La pandémie nous force à nous numériser davantage et je pense que tout le monde y gagne», conclut Me Pierre Soucy.