AirBnB: voyager à moindre coût, mais à quel prix?

HÔTELLERIE. Après Uber et Amigo Express qui ont bouleversé la façon de se déplacer, les offres avantageuses du site internet AirBnB viennent, quant à elles, jouer dans les plates-bandes des hôteliers, même ici, à Trois-Rivières.

Le site internet permet à des particuliers de louer leur logement ou leur chambre à des voyageurs de partout dans le monde, de quoi faire de l’ombre aux hôtels, qui crient à la concurrence déloyale.

Le concept est simple: de New York à Paris en passant près de chez nous au Québec, AirBnB permet de découvrir le monde par le biais d’hôtes locaux pour une facture beaucoup plus légère qu’une chambre d’hôtel traditionnelle.

En effet, le service créé en 2008 est à ce jour implanté dans plus de 190 pays.

Lorsqu’on inscrit «Trois-Rivières» dans le moteur de recherche du site internet, on tombe sur plus de 155 hôtes trifluviens. Une simple chambre, un luxueux logement en plein cœur de la vieille ville ou encore une maison historique: il y en a pour tous les goûts. Les prix peuvent varier de 40$ à 200$.

Des inquiétudes partagées

Ce nouveau modèle d’économie de partage a de quoi inquiéter les hôteliers comme Julie Fréchette, la directrice des Suites de Laviolette à Trois-Rivières.

«J’ai pris connaissance de cette plateforme tout récemment par le biais de connaissances qui utilisent le service. Pour le moment, c’est difficile de quantifier l’impact que cela aura sur nos affaires, mais c’est certain que cela vient jouer dans nos plates-bandes», déclare-t-elle.

Même son de cloche du côté du Gîte Loiselle, situé sur la rue Des Ursulines, qui déplore l’essor d’AirBnB dans la région.

«C’est très désavantageux pour les petits gîtes comme nous, puisqu’eux, ils ne payent pas de taxes pour avoir accès à tous les services de la Ville, comme nous. C’est ce qui explique nos factures plus salées. C’est une nouvelle concurrence, certes, mais déloyale si elle n’est pas réglementée», reproche la propriétaire de l’établissement, Liette Genest.

Déloyal, car les particuliers faisant affaire avec AirBnB n’ont pas encore à payer la taxe sur l’hébergement au Québec.

Par exemple, les Suites de Laviolette doivent se soumettre à des taxes d’environ 15% en plus de respecter des normes strictes pour conserver la réputation de l’hôtel quatre étoiles.

À l’heure actuelle, seulement deux inspecteurs sont en poste pour surveiller l’hébergement illégal au Québec.

Un mois de juillet positif

Encore tout nouveau dans la cité de Laviolette, la plateforme ne semble pas avoir affecté le bilan de juillet des lieux hébergements de la région cette année.

Il faut dire que l’édition 2015 du Grand Prix de Trois-Rivières étirée sur deux fins de semaine, le spectacle du Cirque du Soleil qui a élu résidence à l’Amphithéâtre Cogeco et les nombreux autres événements ont tenu les hôteliers occupés.

Toutefois, si AirBnB n’a pas encore eu d’impact sur le marché jusqu’à maintenant, Julie Fréchette craint ce qui pourrait advenir dans le futur.

«Pour le moment, ça n’a pas affecté nos clients réguliers, mais est-ce qu’on en aurait eu plus s’ils n’avaient pas été là, se questionne-t-elle. Quinze clients qui choisissent le service AirBnB, c’est 15 clients de moins pour les hôtels de la ville».

Du point de vue de Tourisme Trois-Rivières, cela ne peut pas nuire au tourisme, bien au contraire.

«Cela n’empêche pas les gens de venir. Ils ont plutôt l’occasion de choisir l’hébergement de leur choix selon leurs goûts et leur budget. La seule problématique que je vois, c’est la même ciblée par le gouvernement, soit les taxes à percevoir et la classification», affirme la directrice de Tourisme Trois-Rivières, Yolaine Masse.

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Vers une légalisation à l’automne?

Le gouvernement du Québec songerait à légaliser AirBnB à l’automne et, par le fait même, à taxer et traiter ses particuliers comme les hôtels, selon ce que révélait un article paru dans le journal Le Soleil. Une décision en ce sens arrangerait bien les établissements rejoints par L’Hebdo Journal.

«Une fois réglementés par le gouvernement, ils deviendraient un compétiteur comme un autre, indique la propriétaire du Gîte Loiselle. Ce sera toutefois cela de gagné pour les hébergements de la ville».

Cela représentera également une offre complémentaire, ajoute Yolaine Masse, de Tourisme Trois-Rivières. Ceux qui ne se conformeront pas vont s’éliminer et ceux qui sont là pour durer vont rester, pense-t-elle.