Une interminable crue sur la Saint-Maurice  

NAVIGATION. Avec un débit presque trois fois plus élevé que la normale en cette période de l’année, la rivière Saint-Maurice représente un danger pour les plaisanciers s’aventurant trop près des aménagements hydroélectriques. 

Hydro-Québec a émis un avis dans ce sens le 23 juin dernier pour sensibiliser les utilisateurs du cours d’eau et dès le lendemain, à la marina de Grand-Mère, un couple à bord d’un ponton a pu vérifier de lui-même du sérieux de l’avertissement en évitant une catastrophe.

Amarré au quai de la Marina du Vieux Pont en début de soirée le 24 juin, le ponton quitte le quai avant de voir son moteur coupé subitement par l’enroulement d’une corde, laissée à la traîne dans l’eau, autour de l’hélice. Rapidement, entraînée par la force du courant et ne pouvant redémarrer le moteur, l’embarcation se met à dériver en direction de la Centrale Rocher-de-Grand-Mère.

Alertés par les cris de secours du couple, le propriétaire d’un ponton et un client de la Marina de Grand-Mère ont rapidement rejoint l’embarcation qui s’approchait dangereusement des évacuateurs de crues pour la ramener à bon port.  « Heureusement qu’ils avaient eu la présence d’esprit de jeter l’ancre, mais le courant était tellement fort que le ponton bougeait beaucoup. Il était temps qu’on arrive », a expliqué l’un des deux secouristes qui a préféré garder l’anonymat.

Installation d’estacades

Question de délimiter les zones à ne pas fréquenter, des équipes d’Hydro-Québec ont installé le 30 juin des estacades à proximité des centrales Rocher-de-Grand-Mère et La Gabelle. « Il ne faut pas sous-estimer la force du courant », a rappelé Marc-Antoine Ruest, porte-parole de la société d’État.

À la fin du mois de juin, le débit de la rivière Saint-Maurice était de 1700 mètres cubes/seconde alors qu’en temps normal à cette période de l’année, il est de 600 mètres cubes/seconde, c’est-à-dire près de trois fois plus.

« La situation s’explique, souligne Marc-Antoine Ruest, par un important couvert de neige cet hiver jumelé par beaucoup de précipitations ce printemps. « Le réservoir Gouin s’est rempli rapidement ce printemps et il faut évacuer une partie de cette eau-là en ouvrant les vannes de nos évacuateurs de crue en aval. »

Selon les experts en gestion hydrique chez Hydro-Québec, cette situation exceptionnelle sur le principal cours d’eau de la Mauricie pourrait se poursuivre jusqu’à la fin du mois de juillet.  « Nous ne recommandons pas de s’adonner à des activités sur la rivière Saint-Maurice tant et aussi longtemps que les débits demeurent forts », mettait d’ailleurs en garde Hydro-Québec dans son communiqué du 23 juin.

Dans l’ensemble de ses aménagements hydroélectriques à travers la province, Hydro-Québec souligne que seule la rivière Gatineau, en Outaouais, offre une situation comparable à celle de la rivière Saint-Maurice à ce temps-ci de l’année.   

Les canotiers aux aguets

Présidente de l’Association des coureurs en canot du Québec (ACCQ), Sarah Lessard affirme que l’ensemble des membres a été sensibilité à la situation. « Évidemment, la vigilance est de mise rappelle la canotière. Même les traditionnelles courses du mercredi, qui se déroulent normalement au Parc de l’Île-Melville, ont dû être déplacées à trois reprises en raison des forts courants sur la rivière. « Nous avons fait une course au lac à la Tortue, une autre chez Maikan Aventures à Trois-Rivières et mercredi dernier, nous étions du côté de Shawinigan-Sud, sur la Promenade du Capitaine », souligne Sarah Lessard.

Du côté du Parc de l’Île-Melville justement, le directeur général Luc Désaulniers n’a toujours pas commencé à louer des embarcations aux visiteurs. En 2021, c’est plus de 4000 heures de location qui avaient été enregistrées juste pour des paddleboard. L’été au Québec étant courte, c’est déjà un mois de la saison qui est amputé rappelle-t-il. « L’an dernier, nous avions commencé à la fête des Patriotes au mois de mai », se désespérait Luc Désaulniers lorsque nous l’avons contacté le 30 juin dernier.