Un deuil sur la place publique

«On a eu le malheur que notre enfant soit mort dans un gros accident. Par conséquent, on n’a pas pu vivre notre deuil en famille. Non, on s’est fait pourchasser par les journalistes. C’était atroce! On nous a pris en photo à l’hôpital, à notre insu. Il y en a même qui sont venus chez nous. C’était du harcèlement.»

André Fournier et Nika Isabelle, les parents d’une des huit jeunes victimes de l’accident survenu le 16 mars 2000 sur la route du Port, à Saint-Jean-Baptiste-de-Nicolet, en ont encore gros sur le cœur, dix ans plus tard.

«Même à Magog, où l’on a célébré les funérailles de Frédérike, on était suivi par des journalistes. À l’église, on ne voulait pas sortir de l’auto à cause d’eux», se rappellent-ils douloureusement.

«J’en veux aux médias, lance Mme Isabelle. J’en veux à ceux qui nous ont harcelés. Il me semble que lorsqu’on dit non, c’est non!» «Avant l’accident, j’avais déjà une certaine hargne envers l’exploitation des émotions des gens qui vivent un drame, indique M. Fournier. Ça ne l’a que renforcée. Les médias ont fait une incroyable intrusion dans la vie privée des parents à ce moment. Il y a même des journalistes qui s’étaient postés à l’entrée de l’épicerie pour recueillir les commentaires des gens. Ce n’était vraiment pas nécessaire. C’est sûr que lorsqu’un drame pareil arrive, les gens vont pleurer. Mais comme parents, comment peut-on faire notre deuil quand on est toujours pointés du doigt?»

En se rappelant tout ce battage médiatique, André Fournier et Nika Isabelle se considèrent chanceux d’avoir quitté Nicolet le lendemain de la tragédie, pour aller se réfugier auprès de leur parenté à Magog.

«Entre le moment de l’accident et notre départ, on a aussi pu compter sur notre voisin de palier, qui était policier. Il a en quelque sorte servi de «doorman» et bloqué l’entrée aux journalistes trop entreprenants. Ça nous a certainement protégés comparativement à d’autres parents», soulignent-ils.

 

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