« Il fallait sortir des ornières du passé »

Agents de communication à l’époque de la fusion, François Roy et Sébastien Turgeon ont accepté de se replonger dans leurs souvenirs pour raconter les défis qu’ils ont dû relever dans les premiers jours de la nouvelle structure municipale. Parmi ceux-ci, l’harmonisation des noms de rues en a été un de taille.

« L’ancienne ville de Trois-Rivières demandait la fusion depuis longtemps, mentionne d’entrée de jeu M. Roy. C’était souhaité parce que les responsabilités envoyées aux villes par le gouvernement étaient de plus en plus importantes. Les villes centres ont été les premières à écoper, mais ça s’en venait aux villes de périphérie. Ça prenait un corps de police, un corps de pompier, une usine de filtration, un site d’épuration des eaux, etc. Chaque fois, il fallait s’asseoir et négocier. Ça ne finissait jamais. Il fallait faire des régies, des corporations… des structures qui s’accumulaient. C’était des pertes d’inefficacité et des nids à chicane. »

Quand la fusion a finalement été annoncée, lui et M. Turgeon, alors agent d’information à Cap-de-la-Madeleine, n’ont pas perdu une seconde. C’est que la tâche était grande. « C’était une bonne nouvelle, soutient M. Roy. À partir de là, j’étais prêt à vivre les tensions normales d’un changement comme celui-là. »

« On s’est mis au service du comité de transition, renchérit M. Turgeon. Déjà dans les premières heures, j’ai commencé à aider pour la nouvelle élection municipale avec le président d’élection. On a tout de suite commencé à planifier pour que ça se passe le plus en douceur possible. »

Dès le début, le service des communications s’est avéré essentiel. Il fallait informer les citoyens de tous les changements, partout et tout le temps. « Il fallait dire aux gens comment ils auraient leurs services et comment tel service était rendu à telle place et telle autre place, se souvient M. Turgeon. Il fallait accompagner les citoyens dans ce changement. Ça nécessitait beaucoup de communication pour ne pas perdre les gens à l’intérieur de cette nouvelle grande structure. »

Par ailleurs, dans l’organigramme de la nouvelle ville, on se retrouvait avec six trésoriers, six urbanistes, etc. « Les gens avaient à faire leur place dans la nouvelle structure. Par contre, j’ai toujours senti une collaboration de l’ensemble de l’appareil municipal », témoigne M. Roy.

Un tour de force

L’un des principaux défis de l’époque a été au niveau toponymique. Le travail accompli par l’équipe en place a même servi de modèle pour d’autres villes au Québec. « On se retrouvait avec cinq ou six arénas, fait remarquer M. Roy. Il fallait leur donner des noms. Même chose pour les districts électoraux qui étaient identifiés par des numéros. »

« Mais le plus gros du travail, c’était les rues, ajoute ce dernier. Il fallait tout harmoniser. Il y avait plusieurs rues du même nom. On a fait des consultations et en septembre 2004, le travail était accompli. Ça nous a pris deux ans là où des villes ont mis 10-12 ans. »

Selon M. Roy, ce qui leur a permis de régler ce dossier rapidement, c’est le mandat clair qui leur avait été donné dès le départ.

« Yves Lévesque, le maire élu, est un expéditif, laisse tomber M. Roy. Parfois, ça l’a mal servi, mais parfois, ça l’a bien servi. Et dans le cas présent, il ne voulait pas niaiser ni avec le nom de la ville, ni avec le logo, ni avec le nom des rues. Le mandat était clair : faites table rase, montez-moi une nouvelle structure et je vais travailler là-dedans. Et c’est ce qu’on a fait. La commande politique était claire. Il fallait sortir des ornières du passé. Parce que Yves Lévesque était expéditif, pour nous, c’était un avantage. »

Un levier

Si ailleurs au Québec certaines fusions forcées ont laissé des cicatrices, à Trois-Rivières, M. Turgeon est d’avis que les gens s’en sont plutôt servi comme levier pour se démarquer.

« Tout le monde dans son ancienne ville avait sa façon de fonctionner pour la gestion des pompiers, de la police, de l’eau potable, etc., rappelle-t-il. Les gens se sont assis ensemble et ils ont choisi la façon de faire qui leur servait le mieux. »

Pour M. Roy, un exemple évident d’un bon coup de la fusion est le stade de football des Diablos du Cégep de Trois-Rivières. « Avant, ils jouaient dans un stade de baseball converti, précise-t-il. Ils n’étaient jamais chez eux. Il y avait un projet de faire un stade de football, mais l’ancienne ville de Trois-Rivières ne pouvait pas prendre ça à sa charge toute seule. Quand la fusion est arrivée, ç’a pris deux ans et on l’avait, le stade. »

Cet exemple en est un parmi tant d’autres. Il n’y a qu’à penser aux infrastructures souterraines et aux installations d’eau potable. Pour M. Roy, il ne fait aucun doute qu’avec la fusion, la nouvelle ville avait enfin les moyens de ses ambitions.