Gabriel Harvey, ambassadeur de la dysphasie

ENTREVUE. La troisième Semaine nationale de la dysphasie et de la dyspraxie verbale s’est encore une fois très bien déroulée. Icimédias s’est entretenu avec le jeune Gabriel Harvey, un jeune homme dysphasique qui se veut un beau modèle de persévérance et d’ambition.

Gabriel Harvey est gérant adjoint et copropriétaire chez Pacini depuis huit ans. Pour y arriver, il a cependant dû traverser une route plutôt mouvementée.

«Le secondaire était une période difficile et ce l’est encore pour les jeunes dysphasiques. Je me demandais toujours si j’étais comme les autres et on se retrouve dans une section adaptée, alors on est étiqueté handicapé et on se fait intimider. Je cherchais qui j’étais jusqu’à ce que je me réveille avec une bonne claque dans face en secondaire 3», confie-t-il.

«Je me suis dit que c’était assez et qu’il fallait que je me découvre. Je devais me trouver des valeurs alors j’ai commencé avec mes running shoes. Je me suis mis à courir et à m’entraîner, et un an plus tard, je participais à mon premier défi de course pour faire connaître la dysphasie.»

Il se souvient que depuis ce jour-là, c’était devenu sa mission.

«La dysphasie n’est pas assez connue et je trouve que nous ne sommes pas assez appuyés sur le plan de l’intimidation. Je pense qu’il faut en parler plus dans les écoles. L’élève arrive et doit aller voir une personne spécialisée, mais ça le gêne et il a peur de se faire écœurer. Il faudrait plus de soutien! De plus, on manque de ressources, notamment d’orthophonistes», témoigne-t-il.

«Mais aussitôt que l’on comprend que ce n’est pas mortel, bien au contraire, on peut très bien vivre avec la dysphasie. Parmi tous les jeunes dysphasiques que je rencontre, ils ont tous le désir de réussir. Même moi, je suis toujours à la recherche de trucs pour comprendre les aspects de mon travail. C’est juste plus long pour mon cerveau au niveau des explications et plus long pour lui de tout assimiler.»

Le jeune Trifluvien confirme également qu’il est plus difficile pour un dysphasique de trouver du travail.

«Ce qui me fait le plus de peine, c’est que tous les emplois exigent un diplôme de secondaire 5 et c’est beaucoup plus long pour nous de l’obtenir. Sur le plan relationnel, ça dépend du degré de dysphasie de la personne. C’est certain que c’est plus difficile côté amitié, travail et scolaire», explique-t-il.

«On est moins motivé à l’école, car on se sent souvent inférieur. On se compare avec d’autres dysphasiques également. C’est plus dur de s’intégrer aux autres, car on est timide. On a des faiblesses sur le pan de la jasette et moins de facilité à s’exprimer. Encore aujourd’hui, je me compare toujours avec les autres, mais je connais mes défis, mes valeurs et ma capacité.»

Le jeune homme habite un condo avec sa copine et adore son travail. Il fait beaucoup d’activités également. «Je suis heureux parce que je me suis trouvé. J’ai encore du travail à faire, mais j’ai trouvé mes passions. Comme tout le monde, il faut se trouver des objectifs personnels et des activités qui nous rendent heureux.»

De son propre aveu, on devrait le revoir dans un défi sportif «lorsqu’il sera frappé d’un nouveau coup de tête». Pour le moment, il veut se consacrer à 110% dans l’entreprise familière où il travaille pour prendre les rênes du restaurant dans le futur.

En chiffres…

Au Québec, c’est plus d’un demi-million de personnes qui sont affectées par un trouble primaire du langage. À l’âge de 5 ans, 9,4 % des enfants présentent un trouble développemental du langage. À 12 ans, 72 % de ceux-ci ont toujours une problématique persistante sur le plan du langage (OOAQ, 2014).