«Des gens comme vous et moi»

DOSSIER. Qui sont réellement ces Trifluviens à la peau basanée, aux yeux bridés, portant voile ou turban ou parlant une langue étrangère? «Des gens comme vous et moi», résume simplement Maude Fontaine, intervenante au Service d’accueil des nouveaux arrivants de Trois-Rivières (SANA).

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«Des gens qui ont toute une expérience de vie et professionnelle à apporter ici», ajoute-t-elle.

Une expérience dont la reconnaissance, toutefois, est loin d’être évidente, notamment au niveau de la scolarité. «On pense à tort que les immigrants ou réfugiés ne sont pas éduqués ou intelligents. Or, la moyenne de scolarité de nos immigrants est de 15 ans.»

Il faut savoir qu’il y a toutes sortes d’embûches qui font que plusieurs d’entre eux se retrouvent loin du marché du travail. Au départ, leur scolarité doit être évaluée. Ainsi, les diplômés qui  désirent obtenir une équivalence doivent avoir en main une évaluation comparative délivrée par le ministère de l’Immigration, Diversité et Inclusion du Québec, avant de faire les démarches auprès des établissements scolaires.

Cette évaluation décrit les documents scolaires de la personne et indique à quels diplômes et domaines de formation ses études faites à l’extérieur du Québec peuvent être comparées. Elle ne constitue pas un diplôme en soi, ni une équivalence de diplôme, mais un avis d’expert, émis à titre indicatif seulement. Elle ne crée aucune obligation envers les employeurs, les ordres professionnels ou les autres organismes de réglementation.

Un processus complexe

Pour obtenir cette évaluation comparative, des documents bien précis doivent être acheminés au ministère. On parle ici de copies certifiées conformes, par le pays émetteur, des diplômes ou relevés de notes.

«Avant, on pouvait fournir les originaux et le ministère nous les renvoyait, rappelle Maude Fontaine. Maintenant, il faut ces fameuses copies certifiées conformes. Or, ça peut être extrêmement compliqué, pour plusieurs personnes, de les obtenir. Je pense notamment aux réfugiés qui ont fui leur pays. Vous savez, ils sont déjà chanceux s’ils ont leur diplôme dans leur valise! Et là, on leur demande d’obtenir une copie conforme délivrée par leur pays… un pays en guerre! Pensez-vous vraiment que c’est possible?»

Même défi pour obtenir une reconnaissance des acquis et des compétences au niveau professionnel: «Ça prend des lettres d’employeurs du pays d’origine prouvant que le nombre d’heures travaillées correspond à celles exigées par le DEP (diplôme d’études professionnelles). Vous comprendrez que ce n’est vraiment pas évident! Alors au final, ce n’est pas rare que nos arrivants doivent carrément faire une réorientation de carrière.»

Et les enfants?

Pour les enfants de ces personnes, le cheminement vers l’obtention d’un diplôme peut également s’avérer laborieux. «Parfois, il y a des coupures de plusieurs années dans leur scolarité, notamment chez ceux ayant fréquenté un camp de réfugiés, affirme Mme Fontaine. On peut se retrouver avec des ados de 15-16 ans qui ont une scolarité équivalente à une 6e année.»

Pour faire face à ce défi, le SANA a embauché une intervenante communautaire scolaire interculturelle. Son rôle consiste à accompagner, soutenir et orienter l’enfant et les parents à travers tout le processus d’intégration à l’école. Elle est également là pour faciliter la communication entre les parents et les divers intervenants scolaires.

Avec le temps, l’intégration scolaire des jeunes immigrants et réfugiés trifluviens s’est organisée. Ils ont accès à des classes d’accueil spécialisées et de francisation à l’école secondaire des Pionniers et dans deux écoles primaires: Ste-Thérèse et Curé-Chamberland. Plusieurs partenaires collaborent également avec le SANA dans tout ce processus. Un travail conjoint dont l’objectif est de favoriser le succès et l’autonomie de ces jeunes et de leur famille.