DOSSIER – «La philanthropie est une culture difficile à développer»

DOSSIER. La philanthropie est une culture encore peu développée au Québec, surtout au sein de la communauté francophone. Pourtant, plusieurs organisations culturelles misent là-dessus pour diversifier leurs revenus.

C’est notamment le cas pour le Musée québécois de culture populaire, qui dispose d’une fondation, et de l’Orchestre symphonique de Trois-Rivières (OSTR).

«La philanthropie est un enjeu majeur actuellement et je pense que le défi des organismes culturels –c’est valable pour les musées aussi– est lié à leur capacité d’intéresser des partenaires économiques et de développer des sources de revenus autonomes», souligne Yvon Noël, directeur général du Musée québécois de culture populaire.

«Avec les compressions, on perd des partenaires économiques. Ça va nous prendre encore quelques années à rebâtir les critères que nous permettaient ces organismes. On est dans le vide absolu. Il faudra s’adapter et c’est plutôt inquiétant pour les prochaines années, surtout que la subvention accordée au Réseau des musées n’a pas connu d’augmentation depuis dix ans (…). C’est de plus en plus difficile d’équilibrer les budgets», ajoute-t-il.

Assurance-vie et philanthropie

Selon Nathalie Rousseau, directrice générale de l’Orchestre symphonique de Trois-Rivières, il importe de distinguer les organisations qui détiennent un numéro de charité permettant de donner des reçus pour fins d’impôts et les organisations sans but lucratif qui organisent des événements bénéfices, mais ne disposent pas de numéro de charité.

«Aujourd’hui, c’est plus difficile pour les organismes culturels d’obtenir un numéro de charité, car les normes ont été resserrées à Ottawa. Alors, ce que tout le monde fait, ce sont des événements bénéfices. Ça va de l’épluchette de blé d’inde à des soupers gastronomiques», souligne Mme Rousseau.

«La philanthropie est une culture difficile à développer, surtout en ce moment avec la situation économique qui prévaut dans la région. C’est très difficile puisque les gens n’ont pas nécessairement des moyens énormes», ajoute-t-elle.

L’OSTR se fixe d’ailleurs comme objectif de développer cette culture de philanthropie au cours des années à venir.

«En ce moment, ce qui fonctionne bien, ce sont des dons planifiés, entre autres par le biais d’assurances-vie. Cela consiste à contracter une assurance-vie dont l’orchestre sera bénéficiaire au moment du décès. C’est ce volet qu’on essaie de développer. Ça permettrait d’assurer la pérennité de l’orchestre», souligne Nathalie Rousseau.

«L’OSTR est passé à travers de grandes crises et a survécu. Là, on est dans une excellente position, surtout qu’on est encore bien soutenu par les trois paliers de gouvernement et nos salles sont pleines à craquer. On constate que le public est en croissance et le niveau de financement provenant du privé est en augmentation d’année en année. C’est encourageant, mais on sent beaucoup de pression du côté du gouvernement», note-t-elle.

Interpeller les gens d’affaires

Via son projet Arts Affaires, Culture Mauricie souhaite développer des relations entre les artistes et les gens d’affaires de la région afin de réaliser des actions communes.

«La philanthropie est une culture très peu développée au Québec. Après les possibilités de redonner à un hôpital ou une université, la culture vient très loin derrière. Il faut un changement de mentalité et qu’on développe cet aspect. Comme organisme culturel, on doit se structurer et développer des compétences en la matière», soutient Éric Lord, directeur général de Culture Mauricie.

Depuis la création d’Arts Affaires, on a vu des entreprises d’ici commanditer des événements et des artistes et acheter des œuvres d’artistes locaux. «On sait qu’il y a eu des résultats, mais on ignore encore dans quelle mesure, car ça n’a pas été quantifié», ajoute-t-il.

La prochaine activité Arts-Affaires aura lieu en mai.