L’histoire de la police de Trois-Rivières dans un livre

HISTOIRE. Un homme patrouille à pied sur la rue des Forges, à Trois-Rivières, le froid mordant se faufilant dans son uniforme. Un commerçant du coin l’invite à se réchauffer devant un bon café, offert par la maison. C’était à l’hiver 1970, à l’époque où policiers et citoyens se respectaient encore, se souvient Gaëtan Provencher. Policier-pompier à la retraite, historien à ses heures, il sort aujourd’hui un livre retraçant l’histoire du service de police et incendie de la ville.

À travers une partie de sa collection d’artéfacts et de deux ans de travail minutieux à colliger les résultats de ses recherches dans les archives de la ville et auprès de ses anciens confrères, Police & feu Trois-Rivières retrace 160 ans d’histoire oubliée de la «Cité des Trois-Rivières».

«Si j’ai fait ce livre, c’était justement dans le but de pallier ce manque. Sauf quelques chroniques, aucun ouvrage, à ma connaissance, ne s’est attardé au parcours du corps de police de Trois-Rivières, de 1857 jusqu’à la fusion en 2004», indique le collectionneur chevronné.

Ce dernier qualifie son outil de référence de «vitrine muséologique». Plutôt que de rédiger un texte continu, l’auteur laisse les images d’insignes, d’uniformes, d’équipements, de véhicules et de bâtiments à travers les époques raconter l’histoire par elles-mêmes.

On y retrace plusieurs métiers de soutien, aujourd’hui disparus, comme le chef mécanicien, le surintendant des alarmes, l’inspecteur des licences, le constable du service des loisirs, l’aumônier, le quartier-maître ainsi que le policier affecté à la gare ferroviaire et à la traverse des bateaux-passeurs faisant la navette entre Trois-Rivières et Sainte-Angèle-de-Laval.

«La profession s’est beaucoup transformée depuis l’implantation de la première Brigade de police et de feu, au départ nommé Three-Rivers Police, en 1877, à la caserne de la rue Champlain», admet M. Provencher.

Si tous les services de police de la province possèdent aujourd’hui des flottes de véhicules Dodge Charger et Chevrolet Caprice pour faciliter leurs déplacements dans l’exercice de leurs fonctions, il y 45 ans, lorsque Gaëtan Provencher a revêtu pour la première fois l’uniforme trifluvien des forces de l’ordre, c’est encore en marchant qu’il patrouillait le centre-ville.

Il se souvient avoir dû user d’originalité lorsqu’il procédait à des arrestations.

«Le contact humain a pris le bord»

En 35 ans de carrière, Gaëtan Provencher a été aux premières loges pour constater les changements dans le milieu. Certes, l’évolution technique a permis d’améliorer et de faciliter bien des choses, mais il y a beaucoup moins de contacts entre la police et les citoyens maintenant, a-t-il soulevé.

Dans la foulée des manifestations étudiantes et du reportage-choc d’Enquête à ICI Radio-Canada sur les abus de pouvoir de certains policiers sur des femmes autochtones à Val-d’Or, l’image publique de la profession en a pris un coup.

«À mes débuts, les commerçants sur la rue des Forges savaient comment apprécier notre travail et ils nous le montraient. Aujourd’hui, la population ne veut plus nous voir et des remerciements, nous n’en avons pas souvent», déplore celui qui est parti à la retraite en 2004, en tant que lieutenant aux opérations incendies et instructeur.

Ses confrères sont jugés trop rapidement, sans avoir la chance de se défendre, croit-il. En effet, le code de déontologie des forces de l’ordre interdit à un policier de parler aux médias. «Nous n’avons pas le droit d’avoir des émotions. Nous avons qu’une fraction de seconde pour prendre une décision et il faut que celle-ci soit la meilleure possible», ajoute-t-il.

S’il pointe du doigt «l’exagération» de certains médias, Gaëtan Provencher estime également que les quotas ont tué le métier. Les policiers sont maintenant perçus comme des gens qui doivent rapporter, plutôt que comme des agents de la paix.

Un conseil aux nouveaux policiers? «Trouver des moyens pour se rapprocher du public et prendre le temps de parler avec la population», a terminé le policier-pompier à la retraite.